Avantages et défis quotidiens du nouveau profil professionnel advanced practice nurse (APN): entretien avec Regula Burri

J’ai travaillé pendant plus de dix ans comme infirmière diplômée dans différents domaines de spécialité et je voulais évoluer professionnellement. J’étais très intéressée par l’opportunité d’élargir mes compétences cliniques en tant qu’APN et de travailler dans le domaine des soins médicaux de base. 

Au début, j’ai travaillé comme APN au service de psychosomatique stationnaire de l’Hôpital de l’Île, dans le développement de la pratique clinique et dans le coaching de l’équipe soignante. Mais le contact direct avec les patients me manquait de plus en plus. J’ai donc opté pour mon emploi actuel dans le domaine de la rééducation et de la médecine du sport, où je prends en charge des patientes et patients dans le cadre de la rééducation ambulatoire. Mon quotidien a beaucoup changé par rapport à mon travail d’infirmière diplômée. D’une part, la responsabilité en tant qu’APN est nettement plus importante, que ce soit en ce qui concerne le développement de la pratique ou, comme c’est le cas actuellement, le traitement des patients. D’autre part, en tant qu’APN, je suis plus indépendante et plus autonome. Ce nouveau rôle me permet de participer davantage à l’organisation de la prise en charge des patientes et patients et d’initier des changements. La collaboration avec d’autres groupes professionnels est aussi devenue beaucoup plus intense. Mais cela enrichit mon quotidien, et la bonne ambiance de travail au sein de l’équipe interprofessionnelle me procure beaucoup de plaisir. 

Je reçois des patientes et patients en consultation ambulatoire pour des spiro-ergométries (ECG d’effort), mène des entretiens de conseil, effectue des évaluations cliniques, propose des thérapies et discute à chaque fois de la suite du traitement avec les médecins-chef(fe)s responsables. Les outils numériques font partie intégrante de mon quotidien. Le système d’information hospitalier permet d’échanger rapidement des informations avec mes collègues. Je peux également communiquer avec des patientes et patients de manière simple et sécurisée grâce à la fonction de chat de l’application MyInsel. Nous mettons en place actuellement un monitoring cardiaque numérique. Les patientes et patients nous envoient leurs valeurs de tension artérielle ainsi que le nombre de pas effectués par jour, qu’ils mesurent chez eux s’ils utilisent MyInsel. Les valeurs peuvent être saisies manuellement ou transmises directement si une connexion avec une smartwatch et un tensiomètre numérique est possible. Si les mesures sont supérieures ou inférieures à certaines valeurs limites, nous recevons un message et pouvons prendre les mesures appropriées.

Outre les connaissances spécialisées et une pensée critique, une grande compétence sociale me semble être la condition la plus importante. Pour celles et ceux qui aiment vraiment le travail d’infirmier/infirmière et souhaitent disposer de davantage d’autonomie et de responsabilité, cela vaut la peine d’examiner en détail le profil professionnel de l’APN. Les études d’APN ouvrent une multitude de nouvelles portes, ce qui rend cette profession d’autant plus passionnante.

Les compétences cliniques élargies ainsi que les aptitudes en matière de développement de la pratique et de leadership permettent à une APN d’exercer une plus grande influence sur la qualité des soins. Il est essentiel d’identifier les besoins médicaux non satisfaits, de les analyser et de prendre les mesures qui s’imposent. Et il faut également faire preuve de continuité et de persévérance dans la mise en œuvre des processus de changement. Pour que cela fonctionne, il est souvent préférable que l’APN dispose d’un réseau fiable et, dans le meilleur des cas, qu’elle ou il puisse travailler dans une petite équipe avec d’autres APN.

Nous constatons actuellement que l’introduction de la communication numérique et de nouvelles possibilités techniques ne suffit pas pour améliorer la qualité des soins. Il est important d’établir des lignes directrices et des concepts clairs pour pouvoir utiliser les données numériques des mesures effectuées à domicile de manière judicieuse pour le traitement. Il existe également une vaste offre d’informations disponibles sous forme numérique pour soutenir les patientes et patients dans leur rééducation et la gestion de leur maladie. Il convient toutefois de fournir ces informations progressivement et de manière ciblée, et de ne pas trop exiger des patientes et patients.

L’Association suisse des infirmières et infirmiers (ASI) a publié il y a un peu plus d’un an un texte d’orientation sur l’évolution du rôle des APN. Ce document aborde différents sujets, tels que les compétences, la formation, la réglementation et le financement. La volonté d’harmoniser les filières d’études, l’année de pratique structurée et l’introduction d’une autorisation d’exercer me semblent par exemple constituer un énorme avantage pour la profession. Cela permettra de renforcer la reconnaissance de celle-ci et de garantir un haut niveau de qualité de la prise en charge des patientes et patients par les APN.

La transformation numérique dans le système de santé suisse va progresser rapidement dans les années à venir. Je pense qu’en tant qu’APN, je serai chargée principalement d’aider les patientes et patients à utiliser les solutions de santé numériques et à gérer activement leur santé grâce aux nouvelles technologies. Les systèmes basés sur l’IA joueront un rôle de plus en plus important dans l’établissement de diagnostics et le traitement des maladies. Dans le cadre des compétences élargies, nous en profiterons également en tant qu’APN, notamment pour la prise de décision, la gestion des maladies et la rédaction de rapports.